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Nullité des conventions de forfait en jours conclues sur le fondement de la convention collective des experts-comptables

June 05, 2014

By Paul Hastings Professional

Par un arrêt du 14 mai 2014, la Cour de Cassation vient de déclarer nulles toutes les conventions de forfait en jours conclues sur le fondement des dispositions de la convention collective des experts-comptables et ouvre ainsi la voie à des actions prud’homales tendant à obtenir en rappels de salaire pour heures supplémentaires. Un nouveau risque émerge donc pour les employeurs de ce secteur.

A un rythme désormais soutenu, la chambre sociale de la Cour de Cassation se prononce sur la validité des conventions de forfait en jours conclues sur le seul fondement des dispositions des conventions collectives de branche.

Si en 2011, les dispositions de la convention collective de la métallurgie concernant les conventions de forfait en jours avaient été validées par la Cour de Cassation, tel n’a pas été le cas en 2012 pour les conventions de forfait en jours fondées uniquement sur les dispositions des conventions collectives de l’industrie de l’habillement, des industries chimiques et du commerce de gros, ni en 2013 pour celles fondées sur la convention collective des bureaux d’études techniques, cabinets d’ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils (SYNTEC), ni enfin aujourd’hui pour celles fondées sur la convention collective des experts-comptables.

Les conséquences pour les entreprises du secteur couvert par la convention collective des experts-comptables sont en principe temporaires, dans l’attente d’une modification des dispositions de la convention collective afférente à ce sujet. Mais cette période peut durer de longs mois. A ce jour parmi les branches précitées, seuls les partenaires sociaux de la branche du SYNTEC ont modifiés leurs dispositions conventionnelles, mais cela plus d’un après la décision de la Cour de Cassation qui avait censuré la disposition, étant précisé qu’à la date de publication de la présente alerte, ce nouvel accord n’a toujours pas été étendu par le Ministère du travail.

La décision et son fondement

Procédant désormais selon une mécanique bien huilée, la Cour de Cassation commence par rappeler, dans l’arrêt du 14 mai 2014, que le droit à la santé et au repos constituent une exigence constitutionnelle, puis elle analyse les dispositions de l’article 8.1.2.5 de la convention collective des experts-comptables et en conclut que les mesures préventives et correctives prévues par cet article ne garantissent pas que l’amplitude et la charge de travail resteront raisonnables, en n’assurant pas de la sorte la protection de la sécurité et de la santé du salarié. Tirant les conséquences de cette constatation, la Cour de Cassation déclare qu’une convention de forfait en jours conclue sur le seul fondement des dispositions de la convention collective des experts-comptables est nulle.

Cette nullité ouvre donc droit à tout salarié qui a conclu une convention de forfait en jours sur le fondement de la convention collective des experts-comptables la possibilité de demander un rappel de salaire au titre des heures supplémentaires effectuées au-delà de la durée légale du travail.

Il est intéressant de noter dans cet arrêt que le moyen tiré de la nullité de la convention de forfait en jours a été relevé d’office par la Cour de Cassation. Dès lors, même si un salarié, partie à un litige, n’invoque pas la nullité de sa convention de forfait en jours, l’employeur pourra se voir opposer d’office la nullité de cette convention, au motif qu’elle ne garantit pas la protection de la sécurité et de la santé du salarié.

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Quelles suites ?

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Les conséquences de cette décision ne seront pas identiques pour l’ensemble des employeurs soumis aux dispositions de la convention collective des experts-comptables. L’impact différera selon que l’employeur avait ou non conclu un accord collectif à un niveau inférieur à la branche (accord au niveau de l’entreprise ou de l’établissement) relatif aux conventions de forfait en jours.

Si l’entreprise est dépourvue d’accord infra-branche sur ce thème, l’ensemble des conventions de forfait en jours étant fondées sur la seule convention collective, elles sont donc susceptibles d’être déclarées nulles par le juge en cas de contentieux. Afin de réduire le risque de contentieux, il est donc fortement conseillé d’engager des négociations avec les partenaires sociaux en vue de la conclusion d’un accord infra-branche sur ce thème.

En revanche, si l’entreprise est dotée d’un accord infra-branche relatif aux conventions de forfait en jours, la détermination de la validité des conventions de forfait nécessitera une analyse au cas par cas en fonction non seulement des dispositions de l’accord infra-branche et des conventions de forfait conclues avec les salariés, mais également des pratiques de gestion du temps de travail en vigueur au sein de l’entreprise (système de contrôle du temps de travail, réalisation d’entretien(s) sur la charge de travail,…).

Il est donc fortement conseillé de réaliser, dans un premier temps, un audit de conformité juridique sur les dispositions de l’accord infra-branche et du modèle de convention de forfait en jours, ainsi qu’un audit RH sur le suivi du temps de travail, afin de déterminer si toutes les prescriptions jurisprudentielles sont respectées. Dans un second temps, il pourra être opportun de se mettre en conformité (négociation d’un avenant à l’accord collectif, modification le cas échéant du support papier de l’entretien,…) pour ainsi réduire le risque contentieux et de condamnation.

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